Les perspectives sombres pour l’avenir de notre planète doivent nous amener à une profonde remise en question des limites du libre choix individuel.
Je veux souligner ici l’importance de la responsabilité collective face à la responsabilité individuelle qui prévaut aujourd’hui dans nos sociétés occidentales. La responsabilité collective se distingue de la responsabilité individuelle. En effet, liberté et responsabilité sont intimement liées, Il n’y a responsabilité que là où il y a liberté morale ; il n’y a liberté morale que là où il y a conscience et raison. En être libre, c’est à dire conscient et responsable de ce que nous faisons, nous nous devons d’agir pour que la société prenne ses responsabilités. Pour la société, cela signifie qu’elle légifère et prend les mesures utiles et d’intérêt général.
Je ne choisis pas seul, je mets mon raisonnement, mon expérience, ma conscience au service de la collectivité pour que l’on décide ensemble. Les mesures collectives qui en résultent sont respectées parce que choisies et mise en place par la société.
En matière de circulation routière, nous n’avons pas laissé le libre choix de la vitesse. Nous avons reconnu ensemble que si la voiture pouvait représenter un danger pour les autres utilisateurs de la voie publique, il fallait fixer des limitations de vitesse. L’importance de ce choix collectif applicable à tous n’est contesté par personne.
En matière de construction et d’aménagement du territoire, on a reconnu que l’utilisation des terres ne pouvait être libre. Des lois et des règles régissent les constructions et leurs impacts sur le paysage. Aux yeux de tous, le paysage est un bien commun qui doit être préservé et qui doit échapper au mitage.
En matière de consommation, le concept est tout différent. Sous prétexte de protection de la liberté individuelle on a totalement déréglementé le marché. Les mesures collectives sont annulées et bafouées les unes après les autres. On peut citer l’application du principe du Cassis de Dijon qui a enlevé tout leur sens à nos normes de fabrication. Il faut que le consommateur ait du choix et des prix attractifs. Mais est-ce que ce dernier a vraiment le choix, pas toujours, car dans la plupart des cas, la déréglementation profite premièrement aux distributeurs qui a lui toujours plus la possibilité de s’approvisionner à l’étranger au meilleur prix au détriment de la production locale. Le consommateur lui ne peut acheter que ce qu’il trouve dans les rayons du détaillant. Il est finalement le dindon de la farce, il est berné par les distributeurs qui, à coup de publicité, lui font croire qu’eux aussi veulent soutenir la proximité. Les chiffres de l’importation prouvent pourtant bien le contraire.
Est-ce admissible que l’on puisse individuellement choisir entre une tomate produite dans un pays du sud par des esclaves et une tomate produite localement et répondant à nos normes ?
Est-ce qu’il est acceptable d’encourager la consommation avec les prix cassés ou le low cost au détriment des ressources naturelles qui sont un bien commun et que leur raréfaction est un secret de polychinelle ?
Est-ce acceptable de laisser se développer le transport aérien low cost alors que la pollution qui en résulte est importante et qu’elle provoque le réchauffement climatique ?
Pourquoi laisser des citoyens aller librement s’approvisionner de l’autre côté de la frontière alors que les conséquences pour la communauté sont connues ? Baisse du chiffre d’affaires pour bon nombre de commerce et risque de chômage pour leurs employés.
Si la disparition des ressources naturelles affecte l’entier de l’humanité. Si le réchauffement climatique risque de provoquer la fonte des glaciers. Si la libéralisation des échanges fragilise le vivre ensemble. Si nous consommons des marchandises produites dans des conditions sociales inacceptables. Si l’augmentation de la pollution liée à l’activité humaine a des conséquences universelles. Si les prix ne reflètent pas la véritable valeur de nos ressources et la véritable valeur de la sueur humaine ? Si nous sommes tous concernés et impliqués dans ce processus destructif. Pourquoi persister à laisser le libre choix en matière de consommation ?
Le libre choix en matière de consommation est devenu nuisible pour l’ensemble de la société. Aujourd’hui, l’individualisme n’est plus permis car les conséquences sont collectives.
Manger un produit local ou importé de l’autre bout de la planète n’a pas les mêmes conséquences pour l’environnement naturel, social et économique.
Nous sommes face à des choix de sociétés pour lesquels la réponse doit être collective. Ces mesures sont de plusieurs natures, il y a les mesures de réglementation à la frontière pour protéger la production locale et le commerce local ( taxe douanière, valeur du franc, contrôle aux douanes). Il y a la politique de la concurrence qu’il faut changer pour interdire les prix cassés et les soldes toutes l’année. Il faudra également revenir en arrière sur l’acceptation du principe du Cassis de Dijon pour que nos normes soient respectées.
Espérons que nos autorités vont réagir avant que la pollution nous étouffe, que la diversité économique soit un vieux souvenir, que nos commerces ferment après avoir réduit, comme peau de chagrin, les emplois.
Notre planète a un avenir seulement si nos autorités comprennent l’importance à défendre l’intérêt commun à la place des intérêts particuliers.
La Vrille
Willy Cretegny